A la montagne on chante. Ailleurs la transmission familiale semble s’être interrompue brusquement, mais les montagnards gardent des racines très profondes qui, bien que rapetissées par la modernité, constituent un fil direct avec le passé.
Il faut préciser, de plus, que cet amour pour le chant semble être un élément commun et un trait unificateur pour les milliers de variantes culturelles qui caractérisent les civilisations des peuples de toutes les montagnes du monde. Chacun a ses sonorités et sa langue, mais le chant a par sa nature une double valeur: il renforce la conscience de la collectivité et il permet à l’individu, à travers le refrain d’une chanson, d’affronter la solitude. Dans les vastes espaces de montagne, aussi bien pour le petit nombre d’habitants qui rendait plus rares les rencontres que pour la nature solitaire de la grande partie des activités agricoles, de l’élevage du bétail et des travaux artisanaux, le chant pouvait être une consolation et en même temps un exercice pour la mémoire, dans le contexte d’une connaissance qui se transmettait avant tout oralement, pensons au franco-provençal. J’ai toujours pensé que les jeux de l’écho et les voix qui résonnaient entre les vallées - comme nous le voyons dans les jodel du Tyrol - rappelaient des moyens de communication du passé.